Le bois énergie

Notre article précédent de cette nouvelle série didactique introduisait la notion « d’énergies renouvelables » : quoi de plus parlant que la biomasse pour illustrer ce propos. Issue d’une source naturelle qui se renouvelle à l’échelle humaine et qui engendre peu de déchets et d’émissions polluantes, cette ressource appelée communément ‘bois énergie’ est à ce jour la 1re source d’énergie renouvelable en France, aussi bien pour le particulier que pour le professionnel – tertiaire et industrie ! En région au 1er janvier 2023, nous comptabilisons plus de 1 000 chaufferies bois collectives et industrielles en fonctionnement ; composées à près de 90% d’installations de petites et moyennes puissances (inférieur à 1 000 kW).

Qu’est-ce que le Bois énergie ?

Ici nous allons donc nous focaliser sur le bois énergie, terme qui désigne la biomasse employée à des fins énergétiques pour la production de chaleur ou d’électricité. Cette énergie est obtenue par la transformation de la matière organique, au cours d’une combustion contrôlée et maitrisée, dans un environnement tout autant encadré. Dans cet article, nous avons fait le choix de nous focaliser sur la production de chaleur, 1er poste de consommation énergétique en France.

Historiquement ce sont les branches et troncs d’arbres, sous forme de bûches, qui ont initié la filière de production de chaleur à partir des arbres ; continuellement présente pour le particulier grâce aux affouagistes toujours actifs dans nos communes. Cependant, l’alimentation des foyers – ouverts ou fermés – nécessitaient encore une action mécanique / humaine pour apporter le combustible et ainsi faire perdurer la combustion, processus difficile à assurer en cas d’activité ou d’absence.

Au fil du temps et afin de remédier à ces problématiques les équipements se sont améliorés, accompagnés par le développement du combustible sous différentes formes. Répondant à la modernisation requise pour obtenir de nouveaux modes de fonctionnement automatisés et proposant d’excellentes performances, la transformation s’est réalisée via notamment la création de systèmes automatiques et collectifs : les poêles à bois ou granulé ont remplacé les cheminées et foyers ; et les chaudières individuelles ou collectives à bois bûches, granulés et bois déchiqueté sont venus apporter des solutions de remplacement aux chaudières à énergies fossiles. Pour ces nouveaux modes de fonctionnement, apportant autonomie et simplification de la gestion / régulation de température, deux formats de combustibles sont apparus et se détachent actuellement dans la filière bois énergie en France : le granulé et le bois déchiqueté / broyé.  Bien que la bûche soit encore employée par le particulier, ces deux nouveaux combustibles permettent de répondre au mieux aux exigences d’automatisation des chaufferies biomasses, et dans des volumes quantitatifs attendus en solutions collectives – résidentiel et tertiaire – et industriels.

Dans le détail :

  • Le granulé de bois, est un produit normalisé sec de 6 mm de diamètre et 3 à 4 cm de long. Il est obtenu par simple compactage de sciures ou résidus de bois finement broyé, sans additif. Sa fabrication suit un processus industriel spécifique, elle est encadrée par plusieurs normes nationales et européennes permettant d’en garantir sa qualité, et notamment sa grande densité énergétique. Le granulé peut être adapté à tout type de système, du simple poêle individuel domestique à la chaudière automatique de plusieurs centaines de kW pour le tertiaire ou l’industrie. Apportant plus d’énergie que les autres combustibles biomasse (4 700 kWh PCI / tonne pour le granulé, contre 3 600 kWh PCI / tonne pour du bois déchiqueté à 30% d’humidité relative), à volume équivalent, il permet ainsi d’automatiser les installations et d’optimiser la place de stockage – le silo – nécessaire au bon fonctionnement d’une installation pour une autonomie optimale.
  • La plaquette et le broyat, plus éprouvé que le granulé mais moins que la bûche, correspondent à des combustibles bois déchiquetés mécaniquement, de dimensions variées (allant de 8 à 200 mm en circonférence, pour des longueurs de 100 à 350 mm suivant les classifications). Issue de morceaux de bois non valorisables dans les filières classiques – car trop petit / tordu / noueux ou encore malade… dans le cas d’un arbre, ou des chutes / parties inadaptées dans l’industrie, ou encore non réemployable / recyclable dans le cas de produit en fin de vie – sa transformation est rapide mais son séchage par voie naturelle peut demander plus de temps. Combustible demandant moins d’énergie et de transformation pour sa fabrication, il se présente sous différentes classes – granulométrie, humidité, poussières – pour répondre à tout type d’installation de quelques dizaines de kW à plusieurs MW, aussi bien dans le résidentiel que l’industriel en passant par le tertiaire. Son atout réside dans sa production locale, engendrant un coût d’achat inférieur à tout autre combustible.

Ces deux grandes familles illustrent la filière ‘bois énergie’ actuelle, bien que d’autres combustibles biomasse soient employables dans une optique de production d’énergie locale : déchets de bois, haie bocagère, pépins et coques agricoles, pailles…

On constate ainsi que dans l’agriculture, mais surtout l’exploitation sylvicole rien n’est perdu, tout est valorisable puisque l’ensemble des résidus et coproduits trouvent des débouchés, notamment pour la filière bois énergie – chaleur et électricité – puisque quelques installations en cogénération existent également.

Principe de fonctionnement d’une chaufferie bois

Le combustible va être transformé en énergie à l’aide d’un générateur appelé communément chaudière. La particularité du bois énergie tient à la forme de son combustible – solide – contrairement aux autres sources qui elles se présentent sous la forme liquide ou gazeuse. Cet état de fait nécessite la mise en place d’un système d’approvisionnement et de stockage adapté : la chaufferie bois est donc composée de différentes parties, concourant au bon fonctionnement général de l’installation.

Pour commencer il faut mettre en place un réservoir, appelé spécifiquement silo : il va permettre le stockage du combustible sur place, afin d’assurer le fonctionnement de la chaudière pendant une certaine durée définie en fonction des objectifs du site. Des véhicules de différents volumes viendront faire le remplissage périodiquement, à la demande, en provenance de fournisseurs présents localement. Le bois va ensuite être extrait du silo de façon automatique – aspiré ou mécanisé [vis sans fin, tapis roulant…] – pour être amené à la chaudière.

Le transfert du combustible se fait de façon automatique, à l’aide notamment d’une vis sans fin ou encore d’un conduit d’aspiration, apportant respectivement la plaquette ou le granulé dans le foyer de combustion.

C’est alors dans le corps de chauffe de la chaudière que va se dérouler la transformation, avec d’une part, en entrée de l’air et du bois, et d’autre part, en sortie de la chaleur, de la fumée et des cendres. Entre les deux va se dérouler la combustion, qui demande un certain temps et plusieurs étapes afin d’optimiser le rendement de production de chaleur, chaleur qui sera ensuite distribuée par un vecteur – principalement via eau chaude mais possible aussi via vapeur – à l’ensemble des émetteurs raccordés aux réseaux de distributions primaire et secondaire.

Les chaudières bois sont régulièrement associées à un ballon d’hydro accumulation : ce volume d’eau supplémentaire permet de respecter les cycles longs de la combustion bois, et ainsi faire tampon entre le générateur et les émetteurs, augmentant encore le rendement global de la chaufferie.

L’énergie étant produite et livrée, la chaudière va alors rendre les résidus du processus : en partie basse ce sont les cendres et en partie hautes ce sont les fumées. La combustion du bois limitant les émissions de gaz à effet de serres, elle n’est cependant pas exempte de production de polluant mais majoritairement sous la forme de particules fines. Les réglementations en vigueur imposent des systèmes de traitement des fumées avant leurs rejets dans l’atmosphère, chaque installation possède un système dédié, intégré directement ou non à la chaudière en fonction de la puissance.

Historiquement, les chaufferies bois ont toujours comporté plusieurs générateurs : un système principal au bois optimisé pour le fonctionnement en base, accompagné d’un second pour l’appoint et/ou le secours. Aujourd’hui ce n’est plus systématique grâce à l’évolution des technologies et aux retours d’expérience ; mais si le besoin reste présent en fonction de la nature du site, le choix privilégié est un montage en cascade de plusieurs chaudières bois permettant une couverture totale et dans toutes les situations.

Nous avons accompagné la commune d’Arcey (25) dans son projet de création d’une chaufferie bois avec réseau de chaleur pour alimenter la majorité de ses bâtiments. Chaudières bois en cascades, ballons tampons, silo, hangar de séchage… cette installation en fonctionnement depuis octobre 2022 illustre parfaitement cet article. Vous pouvez retrouver plus de détails concernant cette chaufferie sur notre site, via une fiche de présentation, en suivant ce lien : https://gaia-energies.org/collectivites/

Vous y retrouverez également d’autres retours d’expérience de projets accompagnés, de puissance et combustibles variés ; dont Vandoncourt qui, comme Arcey, a fait le choix du bois déchiqueté issu de la transformation de coproduits de bois provenant de sa propre forêt.

Gestion de la ressource forestière

Le bois employé dans les différentes filières – œuvres / industrie / énergie – provient majoritairement des forêts grâce à la sylviculture. Ce terme définit l’entretien de la forêt par l’homme de manière responsable et durable, en accompagnant et orientant l’évolution naturelle des forêts pour qu’elles survivent aux changements climatiques, tout en répondant aux besoins de la société en matière de bois.

Cette démarche assure une gestion durable, en trouvant un équilibre entre les dimensions écologiques et économiques, afin de garantir une biodiversité continue de l’écosystème forestier malgré les évolutions climatiques et sociétales. Depuis près de 25 ans, la certification PEFC des acteurs et produits issus de la forêt permet de contrôler et garantir cette gestion durable. En effet, ce label lorsqu’il est présent sur un produit bois, atteste que la culture et l’exploitation ont été réalisé suivant des pratiques de gestion forestière durable ; mais aussi que toutes les entreprises qui ont ensuite transformé ce produit ont appliqué les mêmes règles.

Dans cette même veine existe également le label FSC.

En France les forêts sont observées, et des analyses sont réalisées pour suivre l’évolution des surfaces et volumes exploités. En région Bourgogne Franche-Comté, le dernier observatoire en date produit par FIBOIS nous apprend que la surface forestière s’étend sur près de 1 764 milliers d’hectares soit plus du tiers du territoire régional ce qui représente 10% de la forêt française ; à majorité de peuplements de feuillus purs pour près de 70%. Il est important aussi de préciser qu’à ce jour le prélèvement reste inférieur à l’accroissement des forêts, assurant près de 20% en gain de stock chaque année. Le volume de bois autorisé à être ponctionné en forêt tient compte de l’augmentation de la mortalité sur ces dernières périodes – mortalité due aux sécheresses et autres crises sanitaires (chalarose, scolytes…) – afin de protéger et maintenir durablement la surface et la qualité nos forêts.

Propriété publique et privée, à hauteur respectivement de 40 et 60 % en région, les forêts françaises sont exploitées en majorité par des professionnels. Devant respecter le Code forestier, ce document permet d’encadrer juridiquement la gestion des forêts, suivant les principes de durabilités – multifonctionnalité – planification. Décliné sous la forme d’un régime forestier pour les forêts publiques, via l’office national des forêts, ce cadre et ses directives associées contribuent à la protection de l’écosystème forestier français.

Cycle vertueux & local

Ainsi ce cadre juridique et les bonnes pratiques prôné par les certifications et labélisation permettent de limiter l’empreinte carbone du bois énergie. Les forêts en particulier représentent un puits de carbone important, étant donné leur absorption du CO2 en phase de croissance suivant le phénomène de photosynthèse produisant en contrepartie de l’oxygène, utile au bon fonctionnement de notre planète. Ce puit se transforme ensuite en réservoir puisque la transformation des troncs en bois d’œuvre et matériaux de construction participe au stockage dans la longue durée, en substituant des matériaux issus des énergies fossiles dans la construction (acier, ciment…). Suivant le même principe, l’emploie des coproduits de bois en tant que combustible permet de substituer des énergies fossiles pour la production d’énergie, réduisant d’autant les émissions polluantes issues de l’extraction et la production des combustibles fossiles et de leur transport. Les filières étant alors locales, autant pour des raisons pratiques qu’économiques, l’impact environnemental s’en trouve amoindri ; même si le cycle de croissance des arbres implique un délai important entre les émissions de combustion et l’absorption lors de la croissance.

Toutefois, les bonnes pratiques forestières misent en place pour exploiter les arbres à maturité avant d’attendre leur fin de vie – en fonction des essences – permettent d’éviter le relâchement de dioxyde de carbone et de méthane issu de la décomposition du bois lors de sa fin de vie. De plus, Il est également important de rappeler que les chiffres de l’observatoire des forêts en France nous confirment que les forêts françaises poursuivent leur accroissement annuel, donc augmentent en surface et/ou en volume de bois sur pied ; ce qui conforte le rôle de puits de carbone de nos forêts par une absorption continu.

Même si l’équilibre entre le carbone émis et capté n’est pas immédiat pour l’emploi du bois énergie, le cycle reste aujourd’hui vertueux par son encadrement grâce à des textes et des bonnes pratiques de la filière, puisque limitant la nécessité d’importation de ressources fossiles provenant de l’autre côté de la planète. Il reste toutefois encore à travailler sur des alternatives à l’emploi d’énergie fossile pour les engins à moteur utilisés pour les travaux forestiers, le transport du bois et sa transformation.

A retenir

La démarche bois énergie est intéressante à plus d’un titre puisqu’elle propose une alternative aux énergies fossiles, via l’emploi d’une ressource locale et maitrisable en valorisant l’ensemble des coproduits et déchets de la filière bois au sens large. Ce débouché permet une maitrise de nos émissions polluantes, en approchant l’équilibre des émissions carbone à l’échelle de notre territoire ; tout en permettant une gestion durable de nos forêts.

Ces éléments permettent également de maitriser les coûts de production des combustibles biomasses, puisque locaux et assurant un débouché à des produits difficilement valorisables par ailleurs, assurant ainsi leurs compétitivités vis-à-vis des énergies habituelles. L’argus produit par l’AJENA, le dernier en date de novembre 2023 ci-dessus, confirme l’intérêt économique des combustibles biomasses – déchiqueté, granulé – puisque situé dans les premières places du classement. Le choix de se chauffer au bois permet ainsi de maintenir une économie locale de territoire, en s’appuyant sur le réseau de professionnel du monde sylvicole fort présent en région.

Pour approfondir le sujet en image :

Si vous avez un projet de bois énergie, des aides sont possibles pour tous les publics, pour en savoir plus sur ces aides n’hésitez à contacter vos conseillers France Rénov’ les plus proches pour les particuliers ou vos animateurs énergies renouvelables pour les autres publics.

  • La mission des conseillers France Rénov’ a pour but d’accompagner les particuliers et les copropriétés dans leurs projets de rénovation énergétique et de déploiement des énergies renouvelables https://gaia-energies.org/particuliers/
  • La mission des animateurs énergies renouvelables a pour but d’accompagner les collectivités, entreprises, associations, établissements de santé et bailleurs sociaux dans leurs projets de déploiement des énergies renouvelables https://gaia-energies.org/collectivites/

Ces deux missions sont financées par la Région, l’ADEME, l’État et ses territoires, l’Europe ; il est donc possible de s’appuyer directement sur tous ces services pour poursuivre le développement de cette filière et son emploi. Sur le territoire de l’Aire urbaine Belfort-Montbéliard-Héricourt-Delle c’est l’Association Gaïa Énergies qui porte ces deux missions. Il est à préciser que la mission des animateurs énergies renouvelables couvre un plus grand territoire dans le Doubs, les Pays du Doubs horloger et du Doubs Central y sont intégrés.

Chaufferie bois de La Chenalotte (25)

Rendez-vous au mois d’avril 2024 pour un article sur la géothermie